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Découvrez la Caverne du Pont-d’Arc, restitution de la grotte Chauvet !

Découvrez la Caverne du Pont-d’Arc, restitution de la grotte Chauvet !

La 21ème minute


Il était une grotte…


La Caverne du Pont-d’Arc, restitution de la grotte Chauvet, permet une plongée aux origines de l’art


Préhistoire(s)

  • Des hommes sculptent et peignent les façades d’une profonde grotte naturelle des centaines d’œuvres d’art.

    Des lions, des ours, des mammouths… Quelques années plus tard, l’entrée de la grotte s’effondre. Des tonnes de roches et de gravats empêchent l’accès à l’immense caverne.

    C’est un désastre. Et c’est un miracle. Ainsi condamnée, les œuvres de la grotte seront préservées.

  • Trois spéléologues, dont Jean-Marie Chauvet, dégagent un accès à la grotte. Pour la première fois depuis 36.000 ans, des yeux humains se posent sur les merveilleuses peintures rupestres.

    Quelques jours plus tard, le préhistorien Jean Clottes est envoyé en Ardèche par le ministère de la Culture.

    Son rapport, rendu le 1er janvier 1995, décrit l’inestimable richesse de la découverte et aussi sa probable fragilité.

    La grotte est fermée au public jusqu’à nouvel ordre.

  • Inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco en 2014,la grotte Chauvet aura sa réplique. En avril 2015, les visiteurs pourront avoir un aperçu de ce qui constitue la plus ancienne, la plus grande et probablement la plus belle grotte ornée connue à ce jour. Il y a 36.000 ans, naissait une œuvre d’art à nulle autre pareille.

 

La Grotte

« Au premier coup d’œil,
je réalise que je suis devant
un chef d’œuvre, un chef d’œuvre absolu. »
Jean Clottes – Décembre 1994

La Grotte Chauvet, c’est quoi ?

« Au premier coup d’œil, je réalise que je suis devant un chef d’œuvre, un chef d’œuvre absolu. » Jean Clottes est pourtant difficilement impressionnable. Premier scientifique à avoir pénétré à l’intérieur de la grotte à Noël en 1994, juste après sa découverte, l’éminent préhistorien a, au cours de sa riche carrière, visité des milliers de grottes ornées dans le monde entier. Quand il découvre les 8.000 m2 de la grotte Chauvet, dans laquelle on pénètre par un étroit boyau vertical, Jean Clottes sait immédiatement qu’il est devant un site d’exception.

Vingt ans de recherches et d’études ont permis de dater l’occupation de cette grotte. Les hommes ont peint et gravé les fresques il y a 35.000 ans. « Cette datation a changé radicalement notre conception classique de l’art, explique Jean Clottes. Jusque là, on croyait à une sorte de progrès de l’art, que les premiers hommes peignaient de manière frustre et moche et qu’ils s’étaient améliorés jusqu’à la plénitude de Lascaux. »

Or, les fresques de Chauvet, deux fois plus anciennes que celles de Lascaux, sont au moins aussi belles, et bien plus grandes. « L’art préhistorique, comme l’art en général, a évolué en dents de scie. A Chauvet, on est à un sommet. »

Jean-Michel Geneste a dirigé les recherches sur la grotte Chauvet pendant des années. Il y voit un témoignage unique en son genre: « Les hommes qui ont peint Chauvet ont organisé une société. Ils n’ont pas d’écriture mais sont capables d’une projection mentale et de transmettre des mythes et des savoirs. Derrière le premier ressenti esthétique, le corps à corps avec la paroi, il y a la découverte de ces ancêtres. Cette surface de roche a enregistré la plus ancienne mémoire des premiers hommes européens. »

L’invention de la grotte
Les trois découvreurs, on dit aussi « inventeurs », de la grotte sont trois spéléologues amateurs: Eliette Brunel, Jean-Marie Chauvet et Christian Hillaire. Les vingt dernières années ont été marquées par des disputes et de longs procès entre ces découvreurs, l’Etat et les propriétaires des terrains sous lesquels se situe la grotte. Ces affaires de dédommagements, de propriété morale, d’expropriation sont aussi des affaires de gros sous. L’accord entre les découvreurs et la société qui exploitera l’espace de restitution de la grotte Chauvet prévoit finalement une rétribution à hauteur de 3% sur chaque billet d’entrée.

La naissance de l’Art

Les 8.000 m2 de la grotte Chauvet accueille 1000 dessins dont 425 figures animales. Quatorze espèces différentes sont représentées parmi lesquelles, fait unique pour l’art pariétal paléolithique, une panthère et un hibou.

Jean Clottes évoque avec passion « ce bestiaire tout à fait original. On trouve les animaux les plus redoutables et les moins chassés. Ours et lions des cavernes, rhinocéros laineux, mammouths… Dans les autres grottes, ce bestiaire ne représente en moyenne que 3% des animaux qui s’y trouvent. A Chauvet, c’est 64%. C’est très étonnant. Il y a 65 rhinocéros à Chauvet contre 10 dans l’ensemble des autres grottes ornées. Même chose avec les 115 lions. »

Plusieurs panneaux et fresques jalonnent le parcours dans la grotte jusqu’à la salle du fond et le chef d’œuvre de la grande fresque des lions. On trouve également un crâne d’ours, posé sur un socle rocheux et entouré d’autres crânes d’ours.

« Il est absolument impossible de deviner pourquoi ils ont peint tout ça, explique Jean Clottes. Je voyage dans des pays où des auteurs de peintures rupestres traditionnelles m’ont expliqué la signification de leurs œuvres. Jamais je n’aurai pu la deviner par moi-même. Les Aurignaciens ne nous ont pas laissé d’explications. »

« Il y a cependant un cadre interprétatif. Cette grotte n’est pas un lieu de vie, donc ces œuvres n’ont pas une vocation esthétique, ou de décor. Par ailleurs, les plus belles fresques se situent au fond de la grotte, à l’endroit le plus dangereux d’accès. Ces types, quels qu’ils soient, étaient préparés. Ils avaient des torches, des outils, de la peinture. Tout ça avait un sens pour eux, ils ne le faisaient pas pour s’amuser. En touchant la paroi, ils entrent en contact avec des forces surnaturelles. En explorant la surface de la roche, ils trouvent des dieux sous forme animale et les dessinent. »

Jean-Michel Geneste note que les artistes de Chauvet « ne représentent pas les arbres, ni le paysage, ni la lune… Ils représentent certains animaux. Ce n’est pas une œuvre naturaliste, mais symbolique. » Pourquoi faisaient-ils ça? « Pour guérir des maladies, pour avoir des enfants, pour avoir la santé, bref pour favoriser la vie, estime Jean Clottes. La plupart des cérémonies religieuses concernent la santé. »

Les Banksy du paléo
Selon les datations du site, les Aurignaciens, issues d’une culture du Paléolithique supérieur (39.000 à 28.000 ans avant le présent), seraient les auteurs des fresques de la grotte Chauvet. Mais il existe d’autres théories. L’homme de Neandertal, qui n’a pas encore disparu à l’époque où est peinte la grotte, pourrait en être l’auteur. D’autres chercheurs ont avancé l’hypothèse, étayée par des études de projection morphologique, selon laquelle ce sont des femmes qui ont réalisé les peintures. Enfin, des études plus polémiques encore posent la question de la couleur de la peau et des yeux des Neandertal, traditionnellement représentés blonds aux yeux bleus dans les ouvrages scientifiques, ou des Aurignaciens. La plus belle et ancienne œuvre d’art de l’humanité pourrait donc avoir été réalisée par une femme à la peau noire.

 

Le Projet

Le défi de la restitution

Dès le début des années 2000, scientifiques et élus ont envisagé un projet de restitution de la grotte Chauvet, fermée au public. Le dossier de candidature pour une inscription de la grotte au patrimoine mondial de l’Unesco a accéléré les choses. Le cahier des charges de l’Unesco réclame en effet une accessibilité, au sens large, des sites au public.

Financé par la région Rhône-Alpes, le département de l’Ardèche et l’Etat, la Caverne du Pont-d’Arc sera, à son ouverture le 25 avril 2015,
la plus grande réplique de grotte ornée au monde. Elle a été installée sur les hauteurs du vallon Pont-d’Arc, en Ardèche, dans un parc boisé de 29 hectares, à une dizaine de kilomètres de la grotte originelle.

«Il n’était pas pensable que ce partage n’ait pas lieu, explique le président de la région Rhône-Alpes, Jean-Jack Queyranne. Il était indispensable de donner à éprouver au plus grand nombre le sentiment de se retrouver face à nos origines, aux débuts de l’Histoire.»

Le chantier a duré 30 mois durant lesquelles 35 entreprises et 150 personnes ont travaillé entre l’Ardèche, Paris et la Dordogne. Le budget de 55 millions, important mais pas colossal au regard des 380 millions d’euros de la Philharmonie à Paris, par exemple, a été tenu. Les 8.000 m2 de la grotte Chauvet ont été «compactés» en une anamorphose de 3.000 m2. Ne restent donc que les parties peintes et sculptées. Le défi a été de recréer le plus fidèlement possible l’ambiance de la grotte et la qualité des dessins et gravures.

Lascaux, le retour
«2015, c’est l’année de la Caverne du Pont-d’Arc. 2016 sera l’année de Lascaux 4.» Geneviève Pinçon, directrice du Centre national de la préhistoire rappelle que la France, qui compte 178 grottes ornées préhistoriques sur son territoire (sur 300 environ connues dans le monde), met le paquet sur les projets de restitution. Lascaux 4, imaginé pour désengorger le fac-similé Lascaux 2, et pensé comme une suite de la restitution mobile Lascaux 3, ouvrira en 2016. Le Centre international de l’art pariétal Montignac, nom complet de Lascaux 4, présentera une reproduction virtuelle intégrale de la grotte en 3D immersive. Les visiteurs, chaussés de lunettes, auront l’impression de pénétrer dans la grotte originelle.

8180 m² de décors réalisés

1000 dessins 425 figures animales

14 espèces différentes représentées


30 mois de travaux

8000m² compactés en 3000m²

350000 visiteurs attendus par an


budget de 55 millions d'euros

Les artistes du XXiE Siècle
dans la caverne

Pour reproduire les chefs-d’œuvre de la grotte, des artistes ont été mis à contribution. «On était dans un dialogue permanent avec le comité scientifique, raconte Gilles Tosello, archéologue de formation. Le but était d’être fidèle au rendu et à la méthode. Il nous a fallu étudier la texture des roches, la granulométrie…»

Les artistes ont pu visiter à plusieurs reprises la grotte originelle. «Ça retourne quand même pas mal. L’émotion est forte, c’est sûr, raconte l’artiste Alain Dalis. Là, le doigt de l’artiste a soulevé un bourrelet de glaise. Il tient comme ça depuis 35.000 ans grâce à quelques microns de matière. Nous, ça nous indique le geste qu’il a réalisé. C’est très précieux.» Les artistes ont utilisé les mêmes méthodes, notamment des fusains de charbon de bois de pin sylvestre. «Les scientifiques nous ont renseigné sur la façon dont les Aurignaciens préparaient certaines parois avant de peindre, raconte l’artiste. Eux n’avaient pas droit à l’erreur, ils n’avaient qu’un essai. Nous avons essayé de garder cette spontanéité du geste.»

«Cette grotte a révolutionné notre perception de l’art préhistorique, rappelle le préhistorien Jean-Michel Geneste. On a découvert que les Aurignaciens connaissaient la perspective et l’estompe, et savaient créer une illusion de mouvement avec la superposition d’images. Mais l’expérience sensible des artistes qui ont travaillé à la restitution est très précieuse, on a pu revivre la genèse de ces œuvres.»

Alors que la caverne du Pont-d’Arc est achevée, les artistes Alain Dalis et Gilles Tosello confessent «un spleen énorme, une sorte de baby blues». Ils savent bien que ce grand projet est peut-être le dernier de cette ampleur. «On espère qu’il y aura d’autres défis à relever mais Chauvet, c’est quand même unique au monde.»

Une entrée réservée aux VIP, Very Important Paleontologist
La grotte Chauvet est fermée au public depuis sa découverte. Seuls les scientifiques et quelques heureux privilégiés ont le droit de la visiter, trois mois par an. «Il faut savoir dire non, constate avec philosophie Marie Badisa, conservatrice de la grotte originelle. Il y a beaucoup de demande et on ne peut faire entrer que quelques personnes pour des séances très encadrées de deux heures maximum.» Fermée à l’origine pour la dangerosité de son accès, la grotte Chauvet bénéficie aujourd’hui du triste précédent de Lascaux, longtemps mise en péril à cause du bouleversement de son atmosphère. «Une grotte est un organisme vivant, explique Jean Clottes. L’hydrométrie, le taux de gaz carbonique, tout ça est interdépendant et difficile à contrôler.»

 

Le défi technologique

La performance de la restitution

Contrairement à la réalisation des fac-similés des fresques, qui s’appuie sur une technique déjà employée, pour Lascaux 2 par exemple, le moulage des roches et minéraux qui composent les 8.180 m2 de parois reproduites a nécessité une performance technologique inédite.

L’humidité, la température et même les odeurs sont contrôlées pour être aussi proche que possible de l’atmosphère de la grotte originelle. Pour ce qui est des roches, la société Phénomènes dirigée par Danièle Allemand, a travaillé deux ans à recréer les immenses concrétions calcaires: draperies, stalagmites, stalactites, pendeloques, fistuleuses… «On a fait une « grottothèque » de moulages, une sorte d’alphabet de tout ce qu’on trouve dans la grotte», raconte Danièle Allemand.

Tout est reproduit avec une absolue fidélité: les microscopiques veines de la roche, les scintillements schisteux, la poussière antédiluvienne… «Ces roches ne sont pas toutes opaques, il y a des jeux de transparence, elles n’ont pas toutes la même réponse à la lumière, détaille Danièle Allemand. On va en profondeur dans la matière, plus loin que la 3D. Il fallait retrouver la granulosité, la même sensation au toucher, et la même densité, pour qu’il y ait la même acoustique.»

L’ambiance unique de la grotte réside aussi dans les concrétions calcaires qui ont continué leur progression depuis la réalisation des œuvres des Aurignaciens. Certaines peintures sont partiellement recouvertes. «Il fallait donner le sentiment de quelque chose qui pousse et qui est vivant, comme une vague au bord de la mer.»

Grotte insalubre
On sait peu de choses sur le mode de vie des Aurignaciens et autres hommes préhistoriques. Ce qui est certain en revanche, c’est qu’ils ne vivaient pas au quotidien dans des grottes mais dans des abris sous roche, ouverts sur l’extérieur. La grotte Chauvet, comme toutes les grottes ornées, n’était pas un lieu de vie. Trop sombres, trop humides, trop froids, on ne pouvait pas y faire de feu. La plupart des grottes étaient en revanche des refuges pour les animaux lors de leur hibernation, notamment les ours des cavernes.

L’architecture
au service du mensonge

Le site de la Caverne du Pont-d’Arc est situé dans les forêts ardéchoises, site naturel exceptionnel, préservé et escarpé. L’architecture du cabinet Fabre-Speller devait répondre à deux exigences, s’intégrer dans ce paysage et signaler sa présence comme un site contemporain pour ne pas mentir aux visiteurs.

«On ne fait pas une vraie grotte même si on fait tout pour que ça ressemble à une grotte», résume Pascal Terrasse, député de l’Ardèche et président du Grand Projet de la Caverne du Pont-d’Arc. «Notre parti pris était un geste contemporain avec du béton pour marquer la différence avec un site naturel, explique l’architecte Xavier Fabre devant
l’une des grandes façades d’un des bâtiments.
En même temps, c’est sobre, on n’est pas à Disneyland.»

Au fond du site, le bâtiment qui accueille la grotte restituée est circulaire, recouvert d’arbres, à la fois camouflé et immanquable par sa taille. Pour des raisons de sécurité évidentes, l’accès à la Caverne se fait par une rampe circulaire monumentale et non au prix d’un exploit spéléologique. « Mais symboliquement, on a voulu que l’entrée du site se fasse par un coude, pour créer un effet de sas », explique l’architecte.

La visite continue
Si la réplique est la star du site de la Caverne du Pont-d’Arc, quatre autres bâtiments accueillent le visiteur: un centre de découverte, un pôle pédagogique, un espace événementiel et un restaurant. L’objectif est de permettre une visite de plusieurs heures. Située au fond du site, la réplique de la grotte peut aussi bien se visiter au début ou à la fin du parcours. Mais les explications pédagogiques et scientifiques seront, pour l’essentiel, données dans le centre de découverte, une sorte de mini-musée. Dans le parc, des ateliers de taille du silex ou d’allumage de feu seront organisés. L’accueil des scolaires a également été pensé avec un bâtiment dédié, une zone de pique-nique… 350.000 visiteurs par an sont attendus.

 

La caverne Pont-d’Arc

l’experience mystique de la Caverne

«La grotte, je la connais par cœur, dans tous les sens du terme, assure le préhistorien Jean-Michel Geneste. Croyez-moi, dans la restitution, on s’y croirait.» Y croire, voilà bien le fond du problème. Aussi fidèle soit-elle à l’ambiance et à la beauté de la grotte Chauvet, la Caverne du Pont-d’Arc reste un fac-similé. Il y a des bouches d’aération, même discrètes, des panneaux de sortie de secours… «Quand on vient ici, on va visiter un mensonge, il faut se préparer à croire, réapprendre à regarder, raconte l’architecte Xavier Fabre. On essaie de mettre les gens dans un état de concentration.» Si la Caverne du Pont-d’Arc est un site touristique et culturel, la réplique de la grotte a été imaginée et doit être vécue comme une expérience mystique.

«L’important, c’est d’y croire, explique le philosophe Michel Serres, adepte de la restitution en 3D de la grotte Lascaux 4. Il n’y a que les imbéciles qui ne croient que ce qu’ils voient. Les humains, et ce depuis des dizaines de milliers d’années, sont capables de croire en ce qu’ils ne voient pas.»

«On a eu une approche la plus humble possible, raconte l’artiste Alain Dalis. Il fallait trouver une intimité avec la grotte, on ne pouvait pas l’atteindre immédiatement. Encore aujourd’hui, il y a toujours quelque chose qui semble nous échapper. J’aimerais que le visiteur de la caverne ressente ça aussi.» Présent dans de nombreux mythes, rites religieux et paraboles philosophiques, le thème de la grotte est l’un des plus partagés de la pensée humaine.
Visiter une grotte, même artificielle, n’est jamais quelque chose d’anodin. Encore moins quand cette grotte abrite les plus anciennes oeuvres d’arts connues.

Cavernes mythiques
Rémus et Romulus y ont été recueillis par une louve, le roi Arthur y dort pour les siècles, la Pythie de Delphes y a ses visions. Pour les Egyptiens antiques, on atteint le royaume des morts par une grotte où coule un fleuve. Mahomet reçut ses premières révélations dans la grotte du mont Hira. Et Luke Skywalker apprend la vraie nature de la Force dans une grotte aux cauchemars. Dans sa célèbre allégorie de la caverne, Platon raconte un mythe selon lequel les hommes vivent enchaînés dans une grotte devant des images produites par des jeux d’ombres sur les murs. Pour Platon, le philosophe est celui qui se défait de ses chaines, quitte la grotte pour voir la vraie lumière du savoir, puis retourne dans la grotte prévenir ses compagnons.

«Il y a une seule représentation figurative humaine dans la grotte. Un corps féminin emboîté dans un bison et un lion. Et cette unique femme, plus vieille représentation du genre connue, est placée sur une roche verticale, accrochée à la voûte, devant la fresque aux lions. Au plus profond de la grotte, devant la plus belle peinture, cette femme est placée dans la position de la spectatrice, là d’où l’on regarde. Je ne sais pas pourquoi les Aurignaciens on fait ça, je n’y étais pas. Mais aujourd’hui, 36.000 ans plus tard, dans cette réplique, cette femme là, c’est un peu nous.»

 

La portée humaniste du projet

En attendant de recueillir les réactions des premiers visiteurs, l’ouverture de la Caverne du Pont-d’Arc réjouit ses auteurs. « C’est un exutoire et une grande satisfaction, souffle l’archéologue Jean-Michel Geneste. Vous savez, ce n’était pas agréable de parler de ces œuvres avec des gens qui ne pourraient jamais les voir. Comme tous les grands privilèges, celui de pouvoir entrer dans la grotte Chauvet était parfois très pesant. »

Pour Richard Buffat, directeur du syndicat mixte qui a organisé cette réalisation, « le mot fierté ne suffit plus. Je sais que ça peut sembler prétentieux mais nous avons le sentiment d’avoir fait quelque chose pour l’humanité. »

La Caverne du Pont-d’Arc recevra les honneurs de la République avec une inauguration officielle en grande pompe. Mais pour les archéologues, le symbole est plus… profond.
« Nous avons un grand devoir, assure Jean Clottes. Ces œuvres nous attendent depuis l’aube des temps humains. Il nous incombe de les préserver et de les admirer. Il s’agit de notre plus précieux héritage en tant qu’hommes. »

 

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